Ne donnons pas aux affaires plus d'importance qu'elles n'en ont. Certes elles perturbent le bon fonctionnement du débat public, mais elles n'empêchent en rien le bouleversement majeur qui va sortir de cette présidentielle, la recomposition du champs politique autour de 4 pôles idéologiques cohérents que représentent Mélenchon(Hamon), Macron, Fillon et Lepen. Mélenchon et Hamon se disputent le même espace politique, mais nous ne retiendrons que Mélenchon qui semble avoir pris le lead sur Hamon grâce à son talent d'orateur.
Avec Olivier Nataf, nous avons conceptualisé ce bouleversement dans "La Riposte Centriste" en reportant les positionnements politiques sur deux axes, l'axe socio-économique et l'axe identitaire. Sur l'axe socio-économique, nous avons ainsi 3 positionnements essentiels, le keynésianisme protectionniste de Mélenchon et Lepen, le libéralisme social de Macron et le néolibéralisme de Fillon. Sur l'axe identitaire, nous avons le multiculturalisme de Mélenchon, l'identité ouverte de Macron et l'identité fermée de Fillon et Lepen. Le croisement de ces deux axes qui représentent les deux dimensions essentielles de la politique permet de mieux comprendre la cristalisation du corps électoral en 4 pôles idéologiques de forces équivalentes, représentant chacun environ 25% de l'électorat.
Le bouleversement tient dans le fait que les deux synthèses, la synthèse de gauche et la synthèse de droite qui avaient structurées la vie politique en 2 pôles, la fameuse bipolarisation et son système d'alternances, ont éclatées. Ce bouleversement fait deux victimes, la gauche de gouvernement de Peillon et Valls, et la droite de gouvernement, de Juppé et l'UDI, qui se retrouvent "le cul entre deux chaises", soit pour le théoriser, dans des rôles d'inter pôles*. Peillon est obligé à contre coeur de rejoindre Hamon pour la campagne par soucis de respecter le résultat de la primaire, tandis que Valls le refuse catégoriquement sans pour autant pouvoir rejoindre Macron qui le rejette. De l'autre côté de l'ancienne frontière entre la droite et la gauche, Juppé se retire de la politique tandis que l'UDI fait une alliance de circonstance avec Fillon, sacrifiant son électorat pour sauver un groupe parlementaire. Le tragi comique de l'histoire est que les parlementaires UDI, qui vont être élus grâce à des voix de droite, s'apprêtent à lâcher la droite et à participer à une majorité derrière Macron si celui-ci est élu et n'arrive pas avec En Marche à obtenir une majorité législative! Inversement, si Fillon est élu, ils participeront à la majorité derrière Fillon.
Derrière le brouillard des affaires, il y a une réalité politique qui évolue en profondeur. Voilà pourquoi, la force centrale que représente Macron n'est pas un phénomène médiatique ou une bulle, mais bien un des 4 pôles de la recomposition politique. Rien ne sert de pointer les insuffisances de Macron et de son mouvement En Marche. Il en a quelques unes, mais c'est bien normal pour un mouvement jeune. Notre responsabilité de centristes authentiques est au contraire de lui apporter notre contribution pour solidifier ce pôle central et en faire un vote d'adhésion. Comment? En le dotant d'une doctrine cohérente et en l'enrichissant d'un discours fort envers les classes moyennes et populaires. C'est justement ce que nous avons essayer de faire dans "la Riposte Centriste"!
Philippe Dervaux
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* Dupont-Aigna et Asselineau sont également dans un rôle d'inter pôles (entre Marine Lepen et François Fillon). Ils ne sont pas victimes de la recomposition puisqu'ils ne gouvernaient pas. Dupont-Aignan peut même grandement profiter des affaires qui touchent François Fillon lors de ces présidentielles.